vendredi 4 avril 2014

Les Expos de 1994: 20 ans plus tard - 2e partie

Les Expos viennent de remporter 94 victoires en 1993. Après un début de saison moyen, ils avaient explosé à la mi-août et ont terminé à trois matchs des Phillies. Ces mêmes Phillies allaient perdre en finale contre les Blue Jays. Deux titres de Séries mondiales en deux ans pour les Jays. En 1994, les Expos tentaient de garder le trophée majestueux au Canada. Mais une ombre noire planait au-dessus de la tête du baseball majeur: la grève.

Dan Duquette y va d'une transaction à première vue controversée. Il cède aux Dodgers le joueur de deuxième but Delino DeShields en retour d'un jeune lanceur prometteur, mais à ce moment uniquement reconnu comme le frère de Ramon Martinez, un dénommé Pedro Martinez. On évoque des raisons uniquement salariales pour ce geste. Certes les finances avaient sûrement à y voir, mais Duquette sait fort bien que Mike Lansing peut occuper le poste au deuxième coussin et que DeShields est une monnaie d'échange extraordinaire. Martinez ne connaîtra qu'une seule saison perdante en 18 saisons dans les majeures et la carrière de DeShields ne s'envolera jamais comme on l'avait escompté. Et Pedro comble la perte d'un autre Martinez, Dennis.

Quelques semaines plus tard, au mois de janvier, Dan Duquette démissionne de son poste et accepte celui de directeur-gérant des Red Sox de Boston. Ce sera Kevin Malone qui acceptera la tâche, mais qui se verra aussi celui qui devra procéder à l'horrible vente de feu de 1995, ordonnée par Claude Brochu. Mais avant cela, de beaux jours s'annoncent.

Les positions principales sont toutes comblées. Darrin Fletcher au poste de receveur, Mike Lansing au deuxième coussin, Wilfredo Cordero à l'arrêt-court, Sean Berry au troisième et un incroyable trio de voltigeurs: Moises Alou, Marquis Grissom et Larry Walker. Seul bémol, toujours à la recherche d'un joueur de premier coussin depuis le départ du Chat en 1991, on confie le poste au jeune prodige Cliff Floyd.

Au cours de l'hiver, on s'efforce de compléter la formation en signant quelques réservistes d'expérience comme Randy Milligan, Freddie Benavides, Juan Bell, Lenny Webster et Jim Gardner. Lou Frazier et Tim Spehr sont de retour et on greffe le nom d'un autre jeune prodige, Rondell White.

Au monticule, outre l'arrivée de Pedro Martinez et le départ de Dennis Martinez, aucun changement n'est apporté. Ken Hill, Jeff Fassero, Pedro Martinez, Butch Henry et Kirk Rueter sont les partants et la dominante relève est composée de John Wetteland, Mel Rojas, Jeff Shaw, Tim Scott et Gil Heredia, qui peut aussi agir au poste de cinquième partant. Au début de la saison, Denis Boucher faisait partie de l'équipe de relève, mais sera cédé aux Lynx d'Ottawa. Au fil de la campagne, on connaîtra les Joey Eischen, Heath Haynes, Rod Henderson, Gabe White et Brian Looney.

Le début de saison est atroce, les Expos ne remportent que quatre de leurs treize premières rencontres. Mais à vrai dire, ce n'est que de l'échauffement. À la fin du mois de mai, leur fiche est de 28 victoires et de 22 défaites et ils ne sont qu'à trois matchs et demi de la tête détenue par les Braves. C'est alors que le rouleau compresseur démarre. Un mois de juin du tonnerre où ils signent 18 victoires en 26 matchs et à la fin du mois, c'est le choc des titans entre eux et les Braves.

Le 27 juin, les Expos accusent deux matchs et demi de retard et les Braves sont justement en visite au Stade olympique. Pas juste les Braves, deux amis, moi et 45 288 autres spectateurs, en délire. Un duel au monticule entre Ken Hill et Greg Maddux, tous les deux auteurs d'une fiche de 10-3. Les Expos gagnent la rencontre 7-2, Cliff Floyd frappe un circuit de trois points en fin de 7e manche. Les gens chantent le Tomahawk Chop dans les estrades. Le Stade n'a jamais autant vibré! Le lendemain, les Expos remettent ça avec une remontée spectaculaire en fin de match pour coiffer les Braves 8-7.

Je me souviens, dans la voiture, après cette belle victoire, nous discutions de la possibilité d'acheter des billets pour les séries. Nous ne voulions pas penser à la grève. Pourquoi perdre notre temps à y penser?

Le 18 juillet, après avoir balayé à domicile dans une série de quatre matchs par les Giants, les Expos entament une incroyable séquence. Ils gagneront 20 de leurs 23 dernières rencontres avant la grève. Qui plus est, le 22 juillet, ils prendront la tête du classement, pour ne plus jamais la perdre. Lorsque la grève est déclenchée, le matin du 12 août, les hommes de Felipe Alou détiennent une avance de six matchs. L'hiver suivant, le gaucher Tom Glavine des Braves avait même confié à Felipe Alou qu'il ne voyait pas comment ils auraient pu dépasser les Expos.

La beauté de ces victoires, cette frénésie qui attirait maintenant les foules au Stade Olympique aurait pu permettre à l'équipe d'accueillir plus de deux millions spectateurs, du jamais vu depuis le début des années 80. En plus, cette probable présence en séries aurait été méritée et aurait fait un pied de nez à tout le baseball majeur.

Même si on dit que les joueurs ont fait la grève, est-ce qu'il est permis de se demander si ces gars voulaient provoquer un conflit de travail? On le sait, les dirigeants syndicaux forcent souvent la main à leurs ouailles et décident pour eux. Oui, c'est vrai, ils doivent démontrer une unité envers leur syndicat, mais s'il y en a un qui voulait vraiment que tout s'arrête, il ne mérite pas d'avoir fait partie de cette équipe, cette équipe grandiose. Les joueurs croyaient que cette folie n'allait durer que deux semaines. Les activités n'allaient reprendre qu'à la fin avril de l'année suivant.

On le sait tous, les Expos ont procédé à une triste de vente de feu. Larry Walker a quitté pour le Colorado en tant que joueur autonome, Ken Hill est retourné chez les Cardinals, Marquis Grissom a été échangé aux Braves et John Wetteland est parti pour le Bronx avec les Yankees.

La saison 1995 des Expos en sera une de transition vers la dernière belle année des Expos, la saison 1996 où l'équipe fut dans la course au meilleur deuxième jusqu'à la toute fin. 88 rencontres seront gagnées. Ce sera leur meilleur total jusqu'à leur départ.

À jamais, cette saison restera gravée. On a bien voulu célébrer cette équipe lors du dixième anniversaire en 2004, mais le départ des Expos était imminent. Mais cette année, un vibrant hommage leur a été rendu, avec mérite. Il en sera question dans mon prochain.

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